Chères vous,
Je vous vouvoie parce que je ne suis pas certaine si nous nous connaissons.
En cette journée mondiale du théâtre pour l’enfance et la jeunesse, je souhaitais simplement vous partager mon Top 5 d’anecdotes préférées de théâtre en lien avec la jeunesse. Le voici très simplement, pas nécessairement en ordre de préférence.
1 - Noël à Notre-Dame
Je ne pourrais pas vous partager mon expérience avec le théâtre sans parler de mon enfance. J’ai grandi dans une petite communauté majoritairement francophone/acadienne dans le sud-est du Nouveau-Brunswick; Notre-Dame de Kent. Même si nous n’avions pas accès au théâtre jeunesse professionnel, le théâtre communautaire faisait quand même partie des traditions de notre paroisse. Chaque année, pendant le temps des Fêtes, l’école organisait un spectacle de Noël (dans les années 90, il prenait la forme d’une pièce de théâtre qui racontait la Nativité). Je me souviendrai toujours, petite moi, 4-5 ans, mettre les pieds dans l’école qui avait été complètement transformée avec de la musique et des personnes en costumes d’époque pour accueillir la foule et d’y croire à 100% même si ces personnages étaient joués par des élèves que je connaissais. Je me souviens du sentiment de fierté de la parenté-spectateur.ices qui bouillonnait dans le gymnase, lui aussi transformé avec une estrade et un décor fabriqué avec amour par les gens de la communauté. J’ai aussi souvenir des émotions que je vivais, avoir peur du Roi et des Rois mages, ressentir une grande émotion quand le bébé est né et avoir des frissons parce que la chorale de l’école chantait de belles chansons pour accompagner chaque scène.
2 - Standby, référent culturel
J’enchaîne avec une autre anecdote d’enfance. OK, le Pays de la Sagouine est un lieu touristique à Bouctouche au Nouveau-Brunswick, à environ 30 minutes de voiture de Notre-Dame. C’est un endroit pas mal magique où on pouvait, entre autres, voir le personnage de la Sagouine raconter ses histoires sur la scène. Pendant plusieurs été de ma jeunesse, ma grand-mère et ma grand-tante, qui étaient de grandes fans, m’amenait toujours avec elles. C’était le seul endroit où on pouvait entendre des histoires qui nous ressemblaient. Des histoires qui nous faisaient tellement rire parce qu’on pouvait imaginer parfaitement chaque personnage et situation qu’elle décrivait. Je me souviens de me dire que ses histoires devaient être très importantes parce que systématiquement, les spectateurs se levaient et applaudissaient même avant le spectacle, dès l’entrée de la dame Sagouine. Et, encore une fois, je me souviens des frissons qui couraient sur mes bras en entendant la musique thème de ce personnage mythique.
3 - Retour
Après avoir terminé mon Baccalauréat en art dramatique à l’université de Moncton, j’ai souvent fait des ateliers de théâtre dans les écoles. À un moment donné, mon école d’enfance (la même que la première anecdote) m’a demandé d’aider un groupe d’élèves qui était intéressé à monter une pièce de théâtre. C’est sûr que j’accepte! Ensemble, nous avons choisi une courte pièce, exploré la création de personnages, découvert que ‘oui, on a le droit de chanter une chanson et de faire une chorégraphie si on veut’. Un jour, après une répétition, l’accompagnatrice d’un élève du groupe me glisse un mot (je l’appelle Max pour l’anonymat) :
‘Faut que je te dise, Max n’a jamais aimé lire, ça toujours été un défi. Mais depuis qu’on a commencé à travailler sur la pièce de théâtre, il ADORE ça. Il a réalisé que les personnages dans les livres sont comme des personnages sur la scène, il peut les jouer et s’amuser avec ça! Ça lui a ouvert tout un autre monde de possibilités!’
4 - Celle-citte est courte
Dans mon parcours, j’ai aussi eu la chance de donner des cours de théâtre aux jeunes à l’Académie de théâtre du Capitol à Moncton. Pendant plusieurs années, je m’occupais de la classe bilingue pour les adolescents. Au premier cours du semestre, j’avais l’habitude de demander aux jeunes pourquoi ils aiment faire du théâtre. La réponse qui m’a le plus marqué: ‘Quand je suis sur scène, je sens que j’ai le droit d’exister’.
5 - Le loup qui cherchait de l’aide
Petite mise en contexte : Lorsque notre compagnie de création Théâtre La Cigogne était encore active (coucou à mes collègues-ami.es!) nous avions écrit une pièce jeunesse de marionnette nommée Le loup; l’histoire d’un incompris. C’était l’histoire d’un petit loup végétarien nommé Ronnie qui cherchait sa famille, mais qui avait de la difficulté à avoir de l’aide à cause de la réputation des loups d’être grands et méchants. Nous avions fait de cette histoire une pièce autoportante, qui se jouait un peu partout (bibliothèques, parcs, parkings…) Lors d’une représentation extérieure dans un parc à Moncton, le loup Ronnie était rendu à un moment de détresse, il proclame de façon un peu mélodramatique :
‘J’ai couru sans trop savoir où aller, j’me disais pourquoi personne veut m’aider pourquoi ça arrive à moi, la vie parfois si cruelle.’ Et sans hésitation, un enfant dans la foule de spectateurs crie : ‘Moi je veux t’aider!!’.
Alors voilà, j’espère que ces anecdotes vous inspireront vous aussi à vous remémorer de beaux souvenirs de théâtre pour enfant ou de théâtre pendant votre propre enfance. Peut-être que ça vous amènera à réfléchir à l’importance de ce volet de théâtre qui me semble souvent négligé, comme si on s'attendait à ce que les gens développent un attachement au théâtre à l’âge adulte. Je ne sais pas. Pour moi, le théâtre c’est l’ultime art de l’empathie, c’est où les gens se rencontrent pour partager leurs histoires, faire vivre en direct leurs points de vue. C'est là où j'ai ressenti le plus de fierté, de joie, de tristesse autant avec des proches que des inconnus. C’est ça la magie du théâtre, non?
Bon, je vous avoue que je n’aime pas finir des lettres ni dire bye. Alors je vous dis, joyeuse journée mondiale du théâtre pour l’enfance et la jeunesse, et au plaisir de se croiser dans un théâtre à un moment donné et de continuer à créer de nouveaux souvenirs.
Prenez garde à vous autres!
Bianca Richard
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